Le champ protokinien dĂ©signe cet espace premier oĂč naissent les gestes, les rĂšgles de vie, la mĂ©moire et le sens, avant quâils ne soient fixĂ©s en formes stables.
Chez les primates, la mĂ©moire du groupe est insĂ©parable de la vie partagĂ©e : les rĂšgles se transmettent en Ă©tant pratiquĂ©es, rejouĂ©es chaque jour dans les interactions. Le passĂ© nâexiste pas comme archive sĂ©parĂ©e : il se confond avec la rĂ©pĂ©tition vivante du prĂ©sent.
Avec lâhumain, une discontinuitĂ© apparaĂźt. Par le langage et lâĂ©criture, la mĂ©moire se dĂ©tache des corps : elle devient rĂ©cit, loi, histoire. Ce qui Ă©tait pratique immĂ©diate se prolonge dĂ©sormais dans un espace symbolique qui permet de relier des communautĂ©s dispersĂ©es. Mais cette conquĂȘte est ambivalente : elle prĂ©serve le lien au-delĂ de la coprĂ©sence, tout en risquant de figer lâĂ©lan vivant dans des formes closes.
Le champ protokinien dĂ©signe prĂ©cisĂ©ment cet Ă©cart. Dâun cĂŽtĂ©, le geste qui invente et dĂ©borde ; de lâautre, la trace qui fixe et conserve. Entre les deux, un milieu instable oĂč la mĂ©moire devient Ă la fois ouverture et clĂŽture, promesse et risque.
Ce champ est aussi un champ de temporalitĂ©. La mĂ©moire constitue un passĂ© disponible, lâimagination ouvre vers un avenir possible, et le geste maintient un prĂ©sent en tension. LâHistoire se joue dans ce triple mouvement : non pas accomplissement linĂ©aire, ni simple reflet des conditions sociales, mais processus dâindividuation toujours inachevĂ©.
Le champ protokinien est donc le lieu dâune expĂ©rience originaire : il rappelle que toute fixation â quâelle soit rĂ©cit, loi ou technique â reste traversĂ©e par lâexcĂšs du vivant, et que le sens naĂźt dans cette tension jamais close entre mĂ©moire, geste et imagination.
J'ai extrait, synthétisé et mis en forme les définitions pour qu'elles soient à la fois rigoureuses (fidÚles au texte) et lisibles (adaptées au web). J'ai conservé les émojis que vous aviez définis dans vos notes pour garder l'identité visuelle.
Vous pouvez copier-coller ce contenu directement dans votre Google Sit
đ§© GLOSSAIRE VIVANT
> Ce glossaire n'est pas un dictionnaire figé. C'est une cartographie des intensités. Chaque mot est une porte vers un régime de l'expérience.
>Â
I. Le CĆur du Concept
đ PROTOKIN
Non pas une substance, ni une fonction, mais un champ pré-ontologique. C'est la dynamique sensorimotrice originaire qui précÚde toute forme stabilisée (langage, institution, objet).
 * En bref : L'irruption sensible du sens avant le signe. Ce n'est pas le corps qui produit le geste, c'est le geste (protokin) qui rend le corps possible.
 * Voir aussi : [Théorie], [Transduction]
II. Les Trois Régimes (La Dynamique)
đ PROTOKINIEN (Le Fond)
Le régime du virtuel pur. C'est le champ de différenciation sans stabilisation. Un réservoir de potentialités, d'affects et de rythmes qui n'ont pas encore pris forme.
 * Analogie : L'électricité statique avant l'éclair. Le silence dense avant la parole.
â PROTOKINĂSIQUE (L'ĂvĂ©nement)
Le régime de l'actualisation. C'est le geste en train de se faire, l'intensité qui surgit. Il est infra-symbolique : il ne veut rien dire, il module une tension.
 * Analogie : Le frisson, le trébuchement, l'élan du danseur avant la pose.
đïž PROTOKENĂSIE (La Trace)
Le rĂ©gime de l'inscription. C'est le devenir durable du geste. Le moment oĂč l'intensitĂ© se stabilise en habitude, en technique, en langage ou en institution. C'est la mĂ©moire vive, mais aussi le risque de la capture (la forme figĂ©e).
 * Analogie : La partition de musique, l'outil, la loi, le rituel.
III. Les Trois Gestes (L'OntogenĂšse Expressive)
đ€Č PRĂHENSION (Le Contact)
Non pas la saisie violente, mais l'adhérence rythmique au monde. C'est la synchronisation charnelle avec le milieu. Saisir sans figer.
 * Régime dominant : Protokinien / Protokinésique.
đ APPRĂHENSION (Le Seuil)
Le moment de tension perceptive. Se tenir en haleine devant l'Ă©mergence d'une forme. C'est l'instant fragile oĂč l'on sent que quelque chose arrive, sans pouvoir encore le nommer.
 * Régime dominant : Protokinésique.
đ§ COMPRĂHENSION (La Tenue)
L'acte de "tenir-ensemble" (com-prehendere). Tisser une cohérence provisoire sans clore le sens. Ce n'est pas maßtriser l'objet, c'est entrer en résonance avec sa structure.
 * Régime dominant : Protokenésie.
IV. Les Libidos (Les Orientations)
Les libidos ne sont pas des pulsions sexuelles, mais des tendances fondamentales du vivant Ă s'orienter dans le champ.
 * đ± Libido Vivendi : DĂ©sir de vivre, de persĂ©vĂ©rer, de croĂźtre.
 * đ¶ Libido Sentiendi : DĂ©sir de sentir, d'Ă©prouver la texture du monde.
 * đš Libido Imaginandi : DĂ©sir de figurer, de crĂ©er des images et des mĂ©taphores.
 * đ Libido Sciendi : DĂ©sir de savoir, de comprendre les mĂ©canismes.
 * âïž Libido Rationi : DĂ©sir d'ordonner, de structurer, de faire loi.
V. Concepts Transversaux
⥠TRANSDUCTION
(Concept issu de G. Simondon)
OpĂ©ration par laquelle une activitĂ© se propage de proche en proche au sein d'un domaine, en structurant ce domaine. C'est le mode d'ĂȘtre du Protokin : une structuration progressive, jamais finie.
đș ĂPIPHYLOGENĂSE
(Concept issu de B. Stiegler)
La mémoire qui n'est ni génétique, ni individuelle, mais technique (les objets, les livres, les outils). Pour le Protokin, c'est la forme ultime de la protokenésie : le geste déposé dans la matiÚre.
đžïž ĂNACTION
(Concept issu de F. Varela)
Idée que la cognition n'est pas la représentation d'un monde préexistant, mais l'avÚnement conjoint d'un monde et d'un esprit. Connaßtre, c'est faire.
đïž BIAIS DE SUBSOMPTION
Tendance de l'esprit à écraser la singularité d'un événement sous une catégorie générale préexistante. Le Protokin est une méthode pour résister à cette subsomption.
Mise en page conseillée sur Google Sites :
 * Utilisez des blocs "Texte rĂ©ductible" (Collapsible text) pour chaque dĂ©finition. Mettez le Mot + l'Ămoji en titre, et la dĂ©finition en contenu cachĂ©. Cela rend la page trĂšs propre et invite Ă "ouvrir" les concepts.
 * Ou utilisez une mise en page 2 colonnes : le terme à gauche (en gros), la définition à droite.
La mĂ©moire nâest pas seulement conservation dâun contenu passĂ©. Elle est lâune des modalitĂ©s par lesquelles le temps se dĂ©ploie pour un ĂȘtre vivant. Dans le monde animal, les rĂšgles du groupe sont mĂ©morisĂ©es dans lâaction elle-mĂȘme : elles se rĂ©actualisent au fil des interactions. Le passĂ© nâest pas sĂ©parĂ© du prĂ©sent, il se confond avec la rĂ©pĂ©tition pratique. La temporalitĂ© y est cyclique, immĂ©diate, inscrite dans les rythmes du corps et de la communautĂ©.
Avec lâextĂ©riorisation du langage et de lâĂ©criture, une autre temporalitĂ© sâinstalle. Lâhomme nâest plus seulement soumis au cycle du groupe et Ă la mĂ©moire incarnĂ©e des gestes. Il peut conserver les traces au-delĂ du moment, les projeter vers lâavenir, les universaliser dans des rĂ©cits. La mĂ©moire devient support dâune continuitĂ© qui traverse les gĂ©nĂ©rations et sâĂ©tend Ă des communautĂ©s dispersĂ©es. Mais en se dĂ©tachant du flux, elle risque de se figer en structures inertes : lois, dogmes, archives. Le temps se linĂ©arise, et avec lui apparaĂźt la tentation de considĂ©rer lâHistoire comme dĂ©jĂ Ă©crite.
La mĂ©moire est ainsi prise dans une double tension temporelle. Dâun cĂŽtĂ©, elle ouvre vers lâuniversel en fixant des traces transmissibles. De lâautre, elle peut rĂ©duire le flux vivant Ă une chronologie close, masquant la conflictualitĂ© de lâexpĂ©rience. Ce paradoxe rĂ©vĂšle quâelle nâest pas un simple dĂ©pĂŽt mais une opĂ©ration de temporalisation : elle constitue le passĂ© en milieu disponible pour le prĂ©sent, de la mĂȘme maniĂšre que lâimagination ouvre vers des possibles Ă venir. MĂ©moire et imagination forment deux versants dâun mĂȘme mouvement : le dĂ©doublement de lâĂȘtre, qui se situe Ă la fois dans ce qui a Ă©tĂ© et dans ce qui pourrait ĂȘtre.
LâĂ©criture accentue ce dĂ©doublement. Elle fait du souvenir une extĂ©rioritĂ© transmissible et du projet une anticipation collective. Ainsi, la temporalitĂ© humaine nâest pas linĂ©aire, mais stratifiĂ©e : passĂ©, prĂ©sent et avenir sây entrelacent dans un jeu de reprises et de projections. LâHistoire nâest pas accomplissement dâune rationalitĂ©, ni simple reflet des conditions matĂ©rielles : elle est ce champ de tensions oĂč la mĂ©moire, en se figeant ou en se rĂ©inventant, oriente la trajectoire du collectif.
La mĂ©moire humaine apparaĂźt alors comme une individuation du temps : elle nâexiste que dans lâĂ©cart entre lâimmĂ©diatetĂ© des gestes et leur fixation en traces, entre la rĂ©pĂ©tition organique et la projection symbolique. Le commun se maintient prĂ©cisĂ©ment dans cet Ă©cart, fragile et conflictuel, oĂč se rejouent sans cesse le passĂ© Ă relire, le prĂ©sent Ă incarner et lâavenir Ă imaginer.
Le virtuel intensif
Zone prĂ©individuelle, non stabilisĂ©e, oĂč lâattention perçoit avant de nommer.
Ni abstraction ni pure sensation, mais un milieu de modulation.
Référence à Simondon (préindividuel), Varela (énaction), Leroi-Gourhan (geste technique primitif).
Les trois régimes du champ
Protokinien : tension virtuelle pure, sans forme définie.
Protokinésique : geste en acte, en cours de formation.
Protokenésie : forme stabilisée ou cristallisée.
(â Lien interne vers page âSchĂ©masâ)
Les trois gestes expressifs
Appréhension : ouverture perceptive, réception du monde.
Préhension : saisie active, exploration, manipulation.
Compréhension : intégration, transformation en sens.
(â Lien interne vers Glossaire : dĂ©finitions dĂ©taillĂ©es)
Connexions
Glossaire vivant : vocabulaire complet du champ.
Schémas : cartographie des tensions.
Critique : analyse des captures du geste.